A moins de deux semaines du début de la Coupe du monde de football au Qatar, une filiale du groupe Vinci réalisant des projets dans le pays a été inculpée, mercredi 9 novembre, dans le cadre d’une enquête sur les conditions de travail des ouvriers lors de certaines Coupes du monde -sites Web liés de 2022 au Qatar. Vinci Constructions Grands Projets (VCGP) a été mis en examen par un enquêteur à Nanterre (Hauts-de-Seine) pour “soumission à des conditions de travail ou de vie incompatibles avec la dignité”, “obtention d’un approvisionnement d’une personne en état de vulnérabilité ou dépendance aux services, avec rémunération sans rapport” et “réduction de la servitude”, a informé le parquet de Nanterre. Convoqué devant l’enquêteur, le représentant du groupe français du BTP “s’est borné à protester contre le temps insuffisant accordé aux avocats pour préparer les réponses utiles et le choix intempestif de la date à quelques jours du début de la Coupe du monde”. du Football”, a déclaré son conseiller, Me Jean-Pierre Versini-Campinchi. La VCGP “va immédiatement déposer un recours demandant au service d’enquête de Versailles de déclarer ce réquisitoire nul et non avenu”, a prévenu l’avocat, notamment en raison d’une infraction ciblée qui n’existait pas au code pénal au moment des faits reprochés. Le procureur a toutefois “réduit le délai de prévention” de cette infraction pour cette raison, a expliqué l’avocat. Lundi, annonçant dans un communiqué sa future convocation par la justice française, le groupe français du BTP avait démenti les accusations de “travail forcé” et de “traite des êtres humains” sur ses chantiers au Qatar. Il a également déclaré qu’il n’avait construit aucun stade ou hôtel pour la Coupe du monde, confirmant que ses projets portaient “principalement sur les infrastructures de transport”.
” Tu peux être [tenus] responsable de ce qui se passe chez vos affiliés”
Le dossier remonte à 2015 et une première plainte a été classée sans suite en 2018. Cependant, des plaintes d’associations sherpa et de la Commission contre l’esclavage moderne (CCEM), ainsi que de sept anciens employés indiens et népalais de ces sites, ont conduit à l’ouverture d’une enquête par enquêteur en novembre 2019. Les plaignants accusent Vinci, Vinci construction grands projets (VCGP), sa filiale au Qatar diar Vinci construction (QDVC) et leurs représentants, de « réduire l’esclavage, la traite des êtres humains, le travail non conforme à la dignité humaine, les risques, blessures involontaires et dissimulation ».
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“Nous saluons cette inculpation. C’est la première fois qu’une société mère est accusée des activités d’une de ses succursales à l’étranger. Le juge envoie un message fort aux agents économiques : « Vous pouvez être [tenus] responsable de ce qui se passe dans vos filiales », a déclaré mercredi Sandra Cossart, directrice de Sherpa France.
Et d’ajouter que c’est “un message fort de la justice” car “ce n’est rien, en France, d’attaquer une entreprise du CAC40”. Mais “ce n’est pas une victoire, car ce n’est qu’un acte d’accusation, l’enquête se poursuit”, a-t-il dit.
Trois chantiers
Pour organiser la compétition de football, le Qatar a confié la réalisation de gigantesques projets de construction (stades, routes, hôtels, etc.) à une armée de travailleurs migrants. Dès les premiers coups de hache, des ONG ont dénoncé les conditions de travail imposées à ces travailleurs.
Trois projets Vinci sont mal vus par ces râleurs : celui du « métro léger » reliant Doha à Lusail, ville nouvelle qui accueillera la finale de la Coupe du monde de football ; Celui des parkings souterrains de Lusail. ainsi que ceux du chantier de l’hôtel de luxe Sheraton au cœur de Doha.
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Selon des témoignages de plaignants recueillis par Sherpa, que Le Monde a pu consulter en novembre 2018, les ouvriers travaillaient jusqu’à soixante-dix-sept heures par semaine dans des températures comprises entre 40 et 50 degrés, pour des salaires très bas. “A cause de la chaleur et de l’humidité, j’ai vu des gens vomir et tomber comme ça par terre”, raconte l’un d’eux. Des témoins ont également signalé la confiscation de passeports, ainsi que le fait d’avoir été entassés dans des chambres exiguës avec des installations sanitaires inadéquates et menacés de renvoi ou de rapatriement si des réclamations étaient faites.
Un audit réalisé en janvier 2019 par différentes organisations syndicales (CGT, CFDT et CFE-CGC) des opérations de Vinci au Qatar a cependant conclu à l’existence de bonnes pratiques d’emploi sur le terrain. Le directeur de l’ONG Sherpa estime cependant que s’il y a eu “des améliorations volontaires (…), cela ne dédouane pas l’entreprise des actions répréhensibles qui auraient été commises entre 2011 et 2014”.
Le Monde avec AFP et Reuters