• À lire aussi: La plaignante relate sa nuit d’enfer: LeBel aurait fait des attouchements à sa victime • À lire aussi: Le procès d’Harold LeBel s’ouvre à Rimouski La plaignante au dossier a témoigné mercredi matin avoir envoyé un long courriel à Harold LeBel en février 2020, soit un peu plus de deux ans après la présumée agression survenue à l’automne 2017. Dans cette lettre, elle racontait les gestes qu’elle lui reproche. Les avances, un baiser forcé, le soutien-gorge détaché, les mains «baladeuses» qui seraient allées jusqu’à l’insertion d’un doigt dans ses fesses. Décrivant sa relation antérieure aux événements avec Harold LeBel comme une amitié «précieuse», elle y parle de la nuit de l’automne 2017 comme de «la grande brisure». «[C’est] comme si le temps s’était arrêté, comme si je ne pouvais pas bouger. La peur et l’incompréhension m’ont rendu immobile», a écrit la plaignante dans cette lettre.

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En réponse le lendemain, Harold LeBel affirmait être «plein de questionnements», un malaise évident s’étant installé entre lui et la femme depuis les événements présumés. C’est alors qu’il a écrit n’avoir «aucun souvenir de tout ça». «Je me souviens m’être réveillé à côté de toi en me demandant ce que je faisais là. Voilà une soirée d’alcool que je voudrais n’avoir jamais connue», a écrit celui qui était toujours à cette époque député de Rimouski, ajoutant être «désolé». «Ce n’est pas moi, ça.» Questionnée par la procureure de la couronne sur l’état de l’accusé en lien avec l’alcool lors de cette soirée, la plaignante a indiqué que malgré quelques verres, tout était «normal». «Il a l’air d’avoir pris quelques verres comme moi. Peut-être un peu pompette j’imagine, mais je n’ai pas remarqué de différence dans la mesure où on avait une bonne discussion. […] On avait des discussions qui se tenaient, il n’y avait rien de marquant», a-t-elle raconté, précisant avoir pris trois ou quatre verres de gin-tonic dans la soirée, comme l’accusé. Peur de subir les conséquences Son témoignage s’était poursuivi en début de journée, la femme racontant n’avoir pas voulu faire de vague avec la présumée agression, craignant qu’on la voie comme une fauteuse de trouble qui s’attaquait à un homme «super aimé», avec une «excellente réputation». «Je préfère mettre ça de côté, faire comme si ce n’était pas arrivé. Mettre ça dans une petite case de mon cerveau», a confié la plaignante, ajoutant avoir eu peur d’elle-même payer pour une éventuelle dénonciation. «On a peur de notre crédibilité parce que c’est tellement une personnalité appréciée qu’on a peur que ce soit nous qui subissions les conséquences», a-t-elle expliqué au jury. C’est cet aspect du témoignage de la femme qui restait à être développé par la procureure de la couronne, Me Manon Gaudreault. Après avoir raconté l’agression en fin d’après-midi mardi, la présumée victime a expliqué ce matin au jury le cheminement qui l’a poussée à porter plainte à l’été 2020 pour l’agression survenue deux ans et demi plus tôt, à l’automne 2017. C’est notamment le mouvement «Moi aussi» et l’arrestation d’une autre personnalité connue du monde politique pour agression sexuelle qui ont réveillé chez la femme un certain malaise avec sa propre situation. «Est-ce que si je ne dis rien, d’autres personnes vont peut-être subir la même chose que j’ai eue», s’est demandé la femme. «J’ai commencé à me sentir mal dans ma peau en ne disant rien. […] Je ne voulais pas avoir ça sur la conscience. Je ne sais pas si ces choses-là vont se répéter», a-t-elle ajouté. Craignant toutefois la tempête médiatique qui vient avec la dénonciation d’un homme politique, il a fallu des avis juridiques la rassurant sur la possibilité qu’une ordonnance de non-publication empêche son identification pour qu’elle fasse le saut. Le 24 juillet 2020, elle s’est finalement rendue dans un poste de la Sûreté du Québec pour y remplir une déposition. Retour sur les faits Avant de lui demander d’expliquer son cheminement, la procureure au dossier a questionné la présumée victime sur certains aspects de son témoignage de la veille quant aux faits reprochés à Harold LeBel. Comme mardi, la femme a relaté avoir été embrassée par le député après avoir pris quelques verres à son condo avec une troisième personne qui était à ce moment au lit. La plaignante et cette autre personne étaient de passage à Rimouski pour des raisons professionnelles et étaient hébergées par LeBel, qu’elles connaissaient et considéraient comme un «bon ami». Après que l’accusé ait détaché son soutien-gorge et qu’elle se soit enfermée dans une salle de bain, la femme a raconté que le député s’était montré insistant malgré ses refus de rapprochement. Il a notamment tenté d’entrer dans la salle de bain où elle s’était réfugiée. «Il cogne, il est très insistant. C’est à ce moment-là que j’ai vraiment eu peur parce que je trouvais que c’était un comportement qui était agressif dans le sens où je venais de dire non, j’avais barré la porte. […] C’est là que je tremblais. Je ne savais pas quoi faire», a-t-elle expliqué au jury. Allant ensuite se coucher dans le salon, la femme a été rejointe par Harold LeBel, qui lui a demandé de se coucher avec elle, ce qu’elle a accepté «pour acheter la paix» a-t-elle relaté, souhaitant qu’il ait compris son refus. Attouchements sexuels C’est là que seraient survenus les attouchements sexuels. Après quelques minutes à distance, Harold LeBel aurait glissé une main vers la femme et lui aurait flatté les fesses, avant de les agripper. Puis, il aurait placé ses doigts dans les fesses de la présumée victime, insérant un doigt dans son anus. «Ce n’était pas très profond, mais c’est rentré parce que c’était douloureux», a raconté la plaignante à nouveau mercredi matin. Questionnée par Me Gaudreault sur ce moment troublant, la présumée victime a précisé qu’elle était à ce moment vêtue d’un pyjama de style «jaquette» et de ses sous-vêtements. «En y repensant, logiquement pour qu’il puisse avoir accès à mes fesses, à ma craque de fesses, à mon anus, je pense qu’il a tassé mes petites culottes ou qu’il les a enlevées. Il a clairement trouvé une façon de mettre sa main-là», a souligné la femme. Ces gestes se seraient ensuite prolongés toute la nuit, la victime demeurant immobile dans le lit du salon. Aucune parole n’a été échangée entre elle et l’accusé a-t-elle ajouté. Le témoignage se poursuit dans la journée de mercredi avec le contre-interrogatoire de la présumée victime par la défense. Harold LeBel a plaidé non coupable à l’accusation d’agression sexuelle. Son procès devant jury est prévu pour une durée de deux à trois semaines.