Après trois semaines d’errance en mer, les 234 migrants secourus entre les côtes libyennes et italiennes par l’ONG SOS Méditerranée ont tous pu débarquer, 230 dans le port militaire de Toulon vendredi et quatre en Corse dans un premier temps, avant d’être transférés vers le pays continental. L’Ocean Viking a quitté Toulon vendredi soir et se trouve provisoirement dans le port de La Seyne-sur-Mer (Var), ont indiqué à l’AFP la préfecture du département et l’ONG. Il restera quelques semaines en France pour une escale technique avant de repartir de Libye pour poursuivre ses sauvetages en Méditerranée centrale.
Tous ont demandé l’asile
Parmi les 234 rescapés, 189, dont 24 femmes et 13 mineurs, se trouvent désormais dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, à une vingtaine de kilomètres de Toulon, transformé en “zone d’attente internationale”. Ce dernier a été créé spécifiquement pour éviter qu’ils soient considérés comme étant en France et pour éviter qu’ils ne partent avant l’examen initial de leur demande d’asile. Jusqu’à présent, tous ont exprimé leur volonté de faire cette demande, selon la préfecture. Ils devront passer des contrôles de sécurité avant des entretiens avec l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), dont les agents sont attendus samedi. Dans un communiqué commun “pour respecter pleinement les droits” de ces personnes, plusieurs organisations, dont l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), l’Union des droits de l’homme ou encore l’Union des avocats de France, ont condamné vendredi la création de cette « zone d’attente » et la « privation de liberté » qu’elle engendre.
“Droits” et “choix politique”
“Il n’y a pas les mêmes garanties de droits” pour les migrants que s’ils étaient sur le sol national, a déclaré samedi à l’AFP la directrice de l’Anafé, Laure Palun, dénonçant un “choix politique” de la France. “L’accueil n’est pas une limitation”, a-t-il déclaré. Les 44 mineurs non accompagnés à bord de l’Ocean Viking ont été pris en charge par les services sociaux et évacués du centre de Giens.
Les deux tiers seront transférés
Au total, plus des deux tiers des 234 personnes, soit 175, quitteront la France pour s’installer dans onze pays, dont l’Allemagne qui en accueillera environ 80, le Luxembourg, la Bulgarie, la Roumanie, la Croatie, la Lituanie, Malte, le Portugal, l’Irlande, Finlande et Norvège. C’est la première fois qu’un bateau-ambulance opérant au large de la Libye débarque des rescapés en France, déclenchant une crise diplomatique avec l’Italie, qui a refusé de l’accueillir. La fureur de l’extrême droite française ne s’est pas apaisée samedi. La figure du Rassemblement national et députée Marine Le Pen a dénoncé un “acte d’incitation” du gouvernement qui pourrait attirer davantage de migrants. en marge de la visite du Salon Made in France à Paris. Au lieu de cela, la gauche, comme Jean-Luc Mélenchon, a salué un “acte d’humanité”. SOS Méditerranée va quitter son côté de la mer “car il y a eu plus de 20 000 morts depuis 2014” en Méditerranée et “nous n’acceptons pas que cette mer devienne un cimetière”.
Ambiance tendue entre la France et l’Italie
Rome, rejetant les critiques de Paris, a appelé vendredi à une “solution européenne”. Mais “en fait, il s’agit plutôt de mettre en œuvre une décision européenne qui a déjà été prise”, a souligné à l’AFP Virginie Guiraudon, experte en migration au CNRS, rappelant qu’un mécanisme européen de “solidarité” a été approuvé en juin. Il demande à une dizaine d’Etats, dont la France, d’accueillir volontairement 8.000 migrants arrivés dans des pays dits “de première ligne” comme l’Italie, mais jusqu’à présent seuls 117 ont été réinstallés, provoquant la colère de Rome.
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Depuis le début de l’année, 1.891 migrants ont disparu en Méditerranée en tentant de rejoindre l’Europe, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).