Cette fin de feuilleton politico-religieux n’est-elle possible que dans les pays concordataires ? Ce jeudi 10 novembre, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé le débat du conseil municipal, qui avait accordé le 22 mars 2021 une subvention de 2,5 millions d’euros à un projet de mosquée dans le quartier de la Meinau. La mosquée Eyyûb Sultan, qui est gérée par l’association religieuse Milli Görüs de droit européen mais qui a ses racines en Turquie, était déjà en construction, sur une superficie de plus de 5 000 m2. En Alsace-Moselle, contrairement au reste de la France, les cultes peuvent recevoir des subventions publiques pour la construction d’édifices religieux. C’est l’une des dispositions du concordat napoléonien qui n’a pas été abolie dans ces territoires en 1905 – ils étaient alors sous domination allemande – ni plus tard après le retour des territoires à la France.
« Perte de soutien d’Ankara »
L’islam n’est pas une religion reconnue par le texte – comme le protestantisme, le catholicisme et le judaïsme – mais dans un souci de justice, la ville de Strasbourg a étendu la possibilité de subventions à la fin des années 1990 aux lieux de culte, aux musulmans. La Grande Mosquée de Strasbourg a ainsi pu couvrir 10% du coût de ses travaux.
« Lorsque la construction a commencé, Milli Görüs ne voulait pas de financement public. A l’époque, la fédération était proche du pouvoir politique en Turquie, expliquait au Monde en mars 2021 Samim Akgönül, responsable du département d’études turques à l’université de Strasbourg. La perte du soutien d’Ankara s’est traduite par un manque de dons et la construction s’est arrêtée. »
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C’est alors que le club s’est tourné vers la ville. Le projet est immense, le complexe abritera une mosquée et un centre culturel. Les 10% apportés par la ville représentent une facture de 2,5 millions d’euros. En comparaison, la grande mosquée de Strasbourg a bénéficié d’une dotation municipale de 868 000 €. Différence de taille : la demande de subvention a alors été approuvée avant le début des travaux.
Entêtement de la municipalité
Lorsque le conseil municipal de Strasbourg, dominé par les écologistes, vote la subvention, la polémique est vive, en Alsace et au-delà. A l’époque, le ministère de l’Intérieur tentait d’imposer sa « carte des principes » à l’islam en France, et Milli Görüs faisait partie des organisations qui refusaient de signer le texte. Le dossier Eyyûb Sultan est tendu, alors que la loi de sécession est en préparation – qui sera approuvée à l’été 2021. Des élus de l’opposition ainsi que le préfet du Bas-Rhin saisissent la justice administrative. Il vous reste 52,59% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.