Bruxelles Avec l’hiver vient la récession. Ce vendredi, la Commission européenne a fortement révisé à la baisse ses prévisions pour l’économie européenne, qui a été frappée par des prix élevés de l’énergie et une forte inflation. Elle prévoit une entrée en récession au dernier trimestre de l’année et qui se poursuivra au premier trimestre 2023. “Nous avons des mois difficiles à venir”, résume le commissaire européen à l’Economie, Paolo Gentiloni. Pour 2022, l’exécutif de l’UE estime la croissance du produit intérieur brut (PIB) pour la zone euro à environ 3,2 % et à 3,3 % pour l’ensemble de l’Union, bien au-dessus des prévisions précédentes (2,7 %) . Jusqu’à présent, l’économie européenne a mieux résisté que prévu à l’impact de la guerre en Ukraine, après s’être remise d’une récession historique en 2020. Grâce aux politiques budgétaires massives du gouvernement pour aider les ménages et les entreprises. Mais l’économie entre maintenant dans une phase beaucoup plus dangereuse. La raison du basculement est connue : pression sur les prix de l’énergie, érosion du pouvoir d’achat des ménages, incertitude et resserrement des conditions de financement. “Le choc de la guerre l’emporte”, observe Paolo Gentiloni. De quoi plonger l’Union, la zone euro et la plupart des États membres dans une récession technique, c’est-à-dire dont le PIB baisse depuis deux trimestres consécutifs. Lire aussi Le risque de récession pèse sur les métaux industriels et le fret Les prévisions pour 2023 ont également été revues à la baisse drastiquement. La croissance du PIB restera légèrement positive, restant à seulement 0,3% pour les pays partageant la monnaie unique (contre 1,4% attendu jusqu’à présent) et l’Union. C’est surtout la forte baisse de la production sur le Rhin qui contribuera à entraîner l’Union dans la récession cet hiver. L’économie allemande, historiquement très dépendante des importations de gaz russe, subit de plein fouet les conséquences de la guerre en Ukraine. Elle enregistrera la pire performance de la zone euro, avec une récession de 0,6 % en 2023, avant de repartir l’an prochain avec un niveau de croissance comparable à celui de 2022. La France (0,4 %), donc l’Italie (0,3 %), les Pays-Bas (0,4 %) et l’Espagne (1 %) connaîtront également un ralentissement économique important l’année prochaine. Toutefois, une reprise est attendue au printemps 2023, “alors que l’inflation desserre progressivement son emprise sur l’économie”, précise l’exécutif européen. Toutefois, cette reprise sera “modérée, car le choc négatif sur les prix de l’énergie va se poursuivre”, souligne Paolo Gentiloni. La croissance accélérera ensuite nettement en 2024 (+1,6% pour l’UE et +1,5% pour la zone euro).

Inflation plus élevée

Il y a cependant une petite clairière dans cette noirceur : c’est le marché du travail qui tient bon. La croissance de l’emploi dans l’UE devrait atteindre 1,8 % en 2022, avant de se stabiliser en 2023 et de se redresser légèrement (+0,4 %) en 2024. Sur le front des prix, Bruxelles s’attend à une inflation plus forte que prévu à 8,5 % (contre 7,6 % prévu auparavant). La bonne nouvelle est que la croissance des prix devrait culminer à environ 9,3 % d’ici la fin de l’année. Si elle reste élevée en 2023, l’inflation tombera à 7% dans l’UE et 6,1% dans la zone euro, pour se stabiliser en 2024 à 3% et 2,6% respectivement. Outre-Rhin, l’inflation serait nettement supérieure à la moyenne en 2023 (7,5 %), près du double de celle de la France (4,4 %). Elle a déjà atteint un niveau record dans le Rhin (voir encadré). “L’incertitude reste extrêmement élevée” à cause de la guerre et pourrait cependant conduire à des chiffres encore pires, a averti Paolo Gentiloni. Les difficultés de remplissage des réserves de gaz naturel pour l’hiver 2023-2024 seront un élément critique. Un échec sur ce front conduirait à un scénario beaucoup plus pessimiste, où le PIB pourrait se contracter de 0,9 % en 2023 et l’inflation s’avérer plus persistante. À VOIR AUSSI – Olivier Véran : “La France est le pays d’Europe où l’inflation est la plus faible”