Michel-Edouard Leclerc est connu pour ne pas avoir sa langue dans sa poche. Invité mardi matin de BFMTV, le patron des centres E.Leclerc a tiré la sonnette d’alarme sur le “tsunami de l’inflation” qui, selon lui, déferlera sur la France dans les prochaines semaines. “L’inflation n’est pas seulement temporaire. Celui à venir avec les nouvelles négociations autour de Noël est à deux chiffres”, a-t-il déclaré, faisant référence aux futures négociations sur les prix entre les principaux détaillants et les producteurs alimentaires. « Aujourd’hui, il y a un nouveau cycle de négociations organisé par la loi (Egalim, ndlr). Nous avons des demandes de prix de tous les groupes de distribution. Mes partenaires me disent qu’il n’y a pas de demande d’augmentation inférieure à deux chiffres », assure Michel-Edouard Leclerc, qui cite plusieurs exemples de produits où les marques demandent des augmentations de prix. Légumes en conserve 17,74 %, huiles et assaisonnements 15,08 %, conserves un peu plus de 20 %, café plus de 10 %, pet food (aliments pour animaux de compagnie, ndlr) 41 %, féculents 10,83 %, volaille 13 % et papier [qui] continue de croître de 11%”, a déclaré Michel-Edouard Leclerc, exhortant les acheteurs à “passer en mode bataille”.
Course à l’armement entre industriels et grande distribution
« Les industriels font leur boulot, mais je veux qu’on re-légitime notre droit à les mettre en concurrence. Il ne s’agit pas seulement de la grande distribution, mais aussi des cantines, marchés centraux pour l’administration”, explique Michel-Edouard Leclerc, qui estime que la grande distribution est limitée par la loi Egalim. C’est que depuis le début de la guerre en Ukraine, les négociations entre industriels et grande distribution sont tendues. Les fabricants accusent les supermarchés de refuser de payer plus pour des produits alimentaires qui coûtent plus cher à produire ou d’augmenter les prix en rayon lorsqu’ils refusent de payer plus pour ces produits. Les distributeurs, quant à eux, estiment que certaines hausses de prix sont injustifiées. En septembre, le président du groupe Les Mousquetaires Intermarché, Didier Duhaupand, a accusé Danone d’exploiter l’inflation pour améliorer ses marges bénéficiaires avec des hausses de prix “absurdes” (de l’ordre de 12% sur ses bouteilles d’eau). Inflation en France DDM – PhR Ce bras de fer se déroule dans un contexte de guerre commerciale entre les différentes enseignes, dont chacune a créé des programmes anti-inflation pour ses clients, entre prix fixes sur un certain nombre de produits de leur distributeur, cash back pour fidélité ou bons de réduction. Enfin, outre la hausse des prix, la grande distribution craint d’être confrontée à des pénuries de certains produits, comme l’a confié fin octobre le PDG de Système U au JDD.Alors que la guerre en Ukraine avait perturbé l’approvisionnement des chaînes – une augmentation des taux de pénurie de produits de 2% à plus de 10% – Dominique Schelcher a déclaré à l’Ouest de la France que “d’ici quelques semaines à quelques mois, des produits ordinaires risquent de manquer dans les rayons”. Et d’expliquer que « selon la Coopérative agricole, qui représente un tiers des enseignes, de nombreux producteurs seront bientôt contraints de choisir des gammes, en raison des coûts trop élevés : les agriculteurs décideront, par exemple, d’abandonner la volaille au profit de des céréales. Les produits les plus chers, comme la charcuterie et le fromage, et ceux qui se vendent moins, vont donc délaisser les industriels qui font face à une explosion de leurs coûts de production, notamment dans l’énergie…
Hausse de 16,9% des prix des produits frais
Sur un an, selon l’estimation provisoire de l’Insee, publiée le 28 octobre, les prix à la consommation ont augmenté de 6,2 % en octobre 2022, après +5,6 % le mois précédent. Sur un an, l’indice harmonisé des prix à la consommation augmenterait de +7,1 %, après +6,2 % en septembre. Côté alimentation, on est passé d’une hausse des prix de +9,9% en septembre à +11,8% en octobre. Dans le détail, les produits frais ont augmenté, passant de +11,3% en septembre à +16,9% en octobre. Les autres produits alimentaires sont passés de +9,6% à +11%.