Avant de finaliser les modalités et le calendrier, Bordeaux Métropole lance ce mois-ci une phase de consultation publique, débutant le mercredi 16 novembre par un stand à Parempuyre et se poursuivant par une réunion publique à Bordeaux le 22 novembre. Dossier hautement sensible car potentiellement explosif socialement, le ZFE s’annonce comme un champ de bataille entre les différentes factions politiques de l’assemblée métropolitaine. Le rival du chef préfectoral du Modem Fabien Robert a décidé de déclencher les hostilités, en lançant ce jeudi une campagne d’affichage : « ZFE = Traffic Prohibition ? Moins polluant sans être exclu, c’est possible. Samedi, il recevra le député Modem des Yvelines Bruno Millienne, qui a effectué une mission éclair sur les mesures d’accompagnement des ZFE, avant d’aller à la rencontre des habitants et des élus.

“Prudence dans l’acceptation de cette mesure”

Comment la majorité écologiste et socialiste de Bordeaux Métropole envisage-t-elle le développement de la ZFE, sachant que sa mise en place doit intervenir au plus tard le 1er janvier 2025 ? On sait déjà que son périmètre sera à l’intérieur du périphérique, qui n’est pas inclus dans le dispositif. “Deux propositions d’échéanciers ont été présentées aux élus, explique Claudine Bichet, vice-présidente d’EELV pour le climat, la transition énergétique et la santé, avec dans les deux cas une première phase en 2024 qui interdirait uniquement les véhicules Crit’Air 4 et 5. [c’est-à-dire les moteurs diesel d’avant 2006 et les essence d’avant 1997], soit 10 % des véhicules circulant en métropole. Ensuite, nous avons un scénario impliquant Crit’Air 3 à partir de 2025 [diesel d’avant 2011 et essence d’avant 2006] et un autre plus progressif, où ils ne seront touchés qu’en 2027.” Si l’élu assure “qu’à ce stade aucune décision n’a été prise”, l’opposant Fabien Robert s’inquiète de ces options. « Je suis favorable au ZFE, explique-t-il, mais selon la manière dont ce dossier est traité, il peut être rejeté et même provoquer des ressentiments, notamment dans certains domaines. Au vu de la crise économique que nous traversons, il faut ajuster le timing et reporter l’interdiction des Crit’Air 4 et 5 au 31 décembre 2024 et Crit’Air 3 à 2027 voire 2028. 38% des ménages les plus pauvres ont Crit’ Air 4 ou 5, contre une moyenne de 15% des foyers métropolitains. Il est donc clair que les premiers touchés seront les ménages les plus pauvres. On a rencontré les “gilets jaunes”, je dis : soyez prudent en acceptant cette mesure. »

La pollution de l’air fait “600 morts par an” dans la métropole

“Si on veut vraiment un impact significatif sur la qualité de l’air, Crit’Air 3 est la charnière, et en les interdisant on mesurera les vrais bénéfices”, analyse pour sa part Claudine Bichet, qui rappelle que la pollution de l’air en métropole est responsable de ” 600 décès par an avec un coût relatif de 300 millions d’euros. « Mais il est vrai que dans le contexte actuel, nous savons qu’il semble peu probable d’interdire Crit’Air 3 à partir de 2025. Cependant, la question reste ouverte et nous sommes prêts à en discuter. » Pour les véhicules Crit’Air 4 et 5, le scénario le plus plausible serait “de débuter leur interdiction en 2024, mais avec une phase d’entraînement préalable, pour être prêt au 1er janvier 2025, sachant que le système de contrôle automatisé que l’état ne devrait pas être prêt avant le second semestre 2024.

La situation dans les bornes de recharge “catastrophiques” d’électricité

Parallèlement, il faudra soutenir financièrement les ménages pour changer de véhicule et l’élu écologiste pointe “les défaillances de l’Etat en la matière” qui obligeront la métropole à sortir de sa poche environ 40 millions d’euros. « Par ailleurs, les personnes hors métropole ne seront pas aidées au même niveau que les personnes originaires de métropole, ce qui pose un grave problème d’égalité de traitement des résidents. Tout ne s’arrête pas aux frontières de la métropole, c’est une question d’aire métropolitaine. » Fabien Robert rappelle pour sa part que le chef de l’Etat a annoncé son intention d’aider les ménages les plus modestes à acquérir un petit véhicule électrique pour 100 euros par mois. « Mais qu’en est-il des bornes de recharge, demande-t-il. La situation en métropole est catastrophique et n’a actuellement aucune chance d’être résolue puisque la majorité aspire à créer 20 stations en 2023 et une “rampe” en 2024. avec 25 stations… A quand un coup d’accélérateur ? Et je ne parle même pas du plan métropolitain de mobilité, qui est en deçà des normes. »

EELV VP défend la montée en gamme et le bio-GNV

Claudine Bichet, pour sa part, défend « la reconversion des véhicules [passage des véhicules thermiques à l’électrique] au lieu de l’achat systématique d’un véhicule neuf électrique et bio-GNV pour les véhicules plus lourds. » « Il n’y a pas que l’électricité qui n’est pas la solution miracle. Il défend aussi un plan de mobilité “ambitieux”, même si “la mise en place des infrastructures de transport prend du temps, reconnaît-il. Et nous souhaitons que l’Etat investisse davantage dans la question des infrastructures ferroviaires. » Après la phase de concertation qui se tiendra dans les 14 villes de la métropole concernée, jusqu’à la fin du premier trimestre 2023, les décisions de mise en place de la ZFE seront prises au cours de l’année suivante. Retrouvez toutes les dates des consultations publiques sur le site de la métropole